La critique
Ne lui dites pas que vous n'appréciez pas tel ou tel comportement, attaquez sa personnalité : tu n'es qu'un(e) égoïste. Tu fais exprès pour ne pas comprendre. C'est essentiellement ta faute si ça va mal dans notre couple. Je ne peux vraiment pas me fier à toi. Tu es irresponsable. Commencez votre critique de façon brutale, ne lui laissez surtout pas le temps de se retourner. Sautez sur lui/elle dès que la porte se referme : Te voilà. Tu sais que t'en as fait une bonne. Mais à quoi tu penses ?
Le mépris
Exprimez vos critiques avec un air de dégoût : tu voudrais que je fasse l'amour avec toi ? Non, mais tu t'es vu ? Regardez-le de haut : Tu n'es qu'un(e) incapable. Riez de lui et tournez-le/la en ridicule.
La défensive
Si votre partenaire a le malheur de vous critiquer, contre-attaquez immédiatement : le problème, ce n'est pas moi, c'est toi. C'est toi qui critiques tout le temps tout le monde. Soyez de mauvaise foi : penses-tu que j'avais le temps de t'appeler pour te dire que j'allais être en retard. Je travaille, moi !
La dérobade
Si vous voulez vraiment faire exploser votre partenaire, faites semblant que vous ne l'entendez même pas : ne laissez pas la pluie de ses injures atteindre le parapluie de votre indifférence. Exemple classique de dérobade : le mari rentre du travail, se fait accueillir par un feu nourri de critiques et, sans mot dire, se retranche derrière son journal. Moins il réagit, plus elle hurle. Finalement, il se lève et quitte la pièce. Ce scénario dure parfois des années, selon la résistance à la souffrance des deux partenaires.
Si vous êtes une femme, vous avez une longueur d'avance en utilisant les deux premiers chevaliers. Si vous êtes un homme, vous ne devriez pas avoir trop de difficultés à devenir expert avec les deux derniers. Et renvoyez-vous la balle. Ne faites jamais quelque tentative de rapprochement que ce soit, du genre : chéri(e), je crois que notre discussion est mal partie. On va essayez de repartir du début. Ne vous excusez jamais, ce serait donner du pouvoir à votre partenaire. N'utilisez jamais l'humour pour désamorcer une querelle. Un petit truc supplémentaire : ressassez les mauvais souvenirs. Réécrivez en pire votre histoire d'amour et rappelez à votre partenaire toutes les fois où il a été fautif.
Si tout va bien, votre mariage deviendra une véritable torture. Vous serez en alerte rouge continuelle. Vous vous détacherez lentement et sûrement l'un de l'autre. Vos problèmes conjugaux deviendront insurmontables. Vous aurez l'impression qu'il est tout à fait inutile d'en parler à la tête dure qu'est devenu votre conjoint. Vous essayerez tant bien que mal de vous y adapter en trouvant par vous-même des solutions qui vous satisferont. Tranquillement (plus rapidement si vous savez manier les quatre chevaliers de l'Apocalypse), la solitude s'installera et vous arriverez à mener des vies parallèles. Pour vous aider à endurer tout ça, vous chercherez des compensations ailleurs et entretiendrez de nouvelles illusions sur votre amant ou maîtresse.
Ne consultez surtout pas un psychologue, vous êtes sur la bonne voie : votre couple court à sa perte, à court ou moyen terme. Ce serait dommage d'avoir fait tout ça pour démissionner à la dernière minute et risquer de sauver votre couple à cause d'un intervenant extérieur qui aurait le goût et l'expertise pour vous aider.
Le choix du partenaire
Pour vous assurer d'être malheureux, choisissez une personne inaccessible. Par exemple, une personne déjà engagée ou mariée avec quelqu'un d'autre. Persévérez dans vos tentatives de séduire une personne qui vous répète qu'elle ne veut pas s'engager ou qui ne peut vous consacrer que très peu de temps à cause de sa profession. Laissez-vous attirer par des personnes d'un autre milieu social, d'un autre pays, d'une autre couleur, d'un milieu socio-économique très différent du vôtre, ou avec une philosophie de vie très éloignée de la vôtre...
Surtout, évitez les personnes tendres, franches qui pourraient vous donner de l'affection. Non, recherchez plutôt des personnes avec qui vous pourrez partager un territoire vide, dénudé, qui deviendra un véritable champ de bataille rempli de haine, de colères, d'insultes. Pour augmenter vos chances, trouvez-vous un manipulateur qui vous retiendra :
- par la jalousie : je n'ai de valeur qui si tu t'occupes de moi et tu n'as pas le droit d'exister en dehors de moi,
- par le chantage : tu agis comme je le veux, sinon je te quitte,
- par la faiblesse : je ne suis rien sans toi, tu ne peux donc me quitter, j'en mourrais,
- par la servitude : je te suis tellement utile que tu ne pourras jamais me quitter,
- par la culpabilité : tout est ta faute si ça ne marche pas entre nous.
Ne quittez jamais de telles personnes, car vous possédez, avec elles, une garantie de malheur à vie. Vous en mourrez probablement.
Statistiques
Soyez confiant dans la réussite de votre malheur en couple. De toute façon, vous partez gagnant. Sur une période de 40 ans de vie commune, vous avez 67 % de chances de divorcer. Et ajoutez 10 % de plus, pour une deuxième union. Si vous voulez faire partie des 50 % de couples qui divorcent à l'intérieur de cinq ans de vie commune, perfectionnez les techniques décrites ci-dessus. Comme l'espérance de vie continue de s'allonger (les biologistes nous prédisent 120 ans en 2050), vous pourriez vous faire inscrire dans le Guinness World Records pour le nombre de divorces. Un divorce tous les cinq ans totalisera vingt divorces sur une période de 100 ans.
En atteignant votre objectif d'être malheureux en couple, vous obtiendrez aussi des avantages très intéressants. En étant malheureux dans votre couple, vous augmentez vos chances de maladies de 35 % et écourtez votre vie de quatre ans. En effet, un mariage malheureux plonge les deux partenaires dans un état d'irritation physiologique chronique et diffuse, augmentant ainsi le stress physique et psychologique. À la longue, ce stress affaiblira votre système immunitaire : vous développerez des affections physiologiques (hypertension, problèmes cardiaques, problèmes respiratoires) et des désordres psychiques (anxiété, dépression, violence, toxicomanies).
Autres avantages non négligeables, vos enfants seront sujets à l'absentéisme et aux échecs scolaires, au décrochage, à la dépression, à la délinquance, au rejet social. De plus, ils augmenteront leurs chances d'être, eux aussi, malheureux dans leur vie sentimentale et de divorcer. Si vous êtes vraiment, mais alors là vraiment, chanceux, vous pourriez trucider votre partenaire et vos enfants et vous suicider par la suite. Quel fin sublime ! Quelle fin extatique !
Évidemment, si vous changez d'idée et décidez de réussir votre vie de couple et de famille, vous devrez utiliser les stratégies inverses de celles qui sont décrites ci-dessus et modifiez vos croyances en conséquence. Ce ne sera certes par facile : vous devrez faire des efforts, apprendre à être tolérant, accepter votre partenaire tel qu'il est, vous rappeler les bons souvenirs, vous faire des compliments, cultiver l'estime réciproque, évoluer dans la même direction, vous regarder, accepter de vous faire influencer par votre partenaire, résoudre les conflits solubles et accepter les désaccords permanents. Mais vous devriez y arriver, car si vous avez été capable d'apprendre à être malheureux, cela prouve une chose : vous êtes capable d'apprendre.
Vous pourriez apprendre à être heureux.