Autrefois, un roi féroce et tyrannique décréta que tous ses sujets devaient se prosterner devant lui et à son passage, mettre le front à terre.
Tous obéirent à cette injonction et, comme des moutons, s’exécutèrent avec un empressement servile. Si, parmi son malheureux peuple, quelqu’un s’était avisé de le contredire, bien évidemment, il aurait eu la tête tranchée. Or, parmi tous ceux qui préféraient l’humiliation à la mort, il y avait un qui avait adopté un choix bien différent et jamais il n’aurait baissé le regard ou plié le genou.
Ayant eu vent de cette attitude scélérate, le monarque, fort courroucé, laissa éclater sa colère et dit au rebelle :
- Sais-tu combien il est dangereux de bafouer l’honneur royal ? J’exige que sur l’heure tu te soumettes !
Mais le hardi jeune homme tint tête et déclara fièrement :
- Qu’est-ce un homme à genoux sinon un mouton ou pire un esclave ? Que valent donc votre sceptre et votre couronne si vous gouvernez une assemblée de lâches ? Si parmi tous ces gens, un seul ose vous défier et se tient debout, n’y gagnerez-vous pas honneur et gloire ? Quel mérite à diriger un royaume de couards ? Si, cependant, un seul doit servir, par son courage, votre image, alors je serai celui-là.
Le roi, flatté par ce discours, convint de sa justesse et décida, d’un ton magnanime, que toute cette mascarade devait cesser sans tarder afin que chacun retrouve sa dignité. Ce faisant, il ignorait, bien évidemment, qu’en agissant ainsi, il servait plus la cause de son peuple que la sienne, puisque la peur déserta définitivement son royaume. Et tous purent, enfin, connaître le goût ineffable de la paix.