Un jeune garçon travaillait autrefois dans les rues d'une ville.
Il cirait des chaussures et malgré la modestie de sa condition, il remplissait sa tâche avec conscience et bonne humeur. Un jour, un homme élégant requit ses services et l'enfant, obligeamment, répondit parfaitement à son attente.
Quand l'ouvrage fut terminé, le client ne se contenta point de donner la somme due, et offrit un écu d'or au vaillant petit cireur.
- Mais, déclara le généreux client, en échange de cette pièce, j'aimerais que tu accomplisses une action en faveur d'autrui et une autre en la tienne. Dans quelque temps, je reviendrai et peut-être aurai-je pour toi un nouveau présent.
Bien évidemment, le jeune garçon ne se fit pas prier et accepta sans condition les clauses de cet alléchant contrat. Plusieurs mois passèrent et un beau matin, le mystérieux étranger fut de retour. Depuis longtemps le cireur l'attendait et avec empressement il lui montra le résultat de ses entreprises. En échange d'une partie de l'argent, il avait acheté tout un lot de poules bien grasses. Ainsi, non seulement sa famille, mais tout le quartier pouvait largement profiter des œufs qu'elles pondaient. L'homme s'émerveilla devant tant de générosité et ne douta pas un seul instant du bon emploi qu'avait pu faire l'enfant du reliquat.
Soudain, dans le poulailler, il vit apparaître un renard. Aussitôt, il voulut émettre quelques craintes mais l'enfant déclara en souriant :
- N'ayez point d'inquiétude : c'est le cadeau que j'ai choisi pour moi et les poules ne courent aucun danger.
L'homme s'étonna et regretta d'avoir fait confiance à ce jeune écervelé. Mais ce dernier ne se démonta pas et poursuivit :
- Toute ma vie, j'ai rêvé de posséder un animal au pelage de feu. Cependant, j'ai au fond de moi un désir plus profond : celui de voir un jour régner l'harmonie entre les hommes. J'ai donc longuement et patiemment apprivoisé mon compagnon de jeu et ai dompté sa fougue. Depuis, c'est lui le meilleur gardien du lieu. Et quel plus bel encouragement pour nous tous de voir uni ce qui, au départ, ne pouvait l'être ?
Sans un mot, l'homme tendit à l'enfant, pour prix de sa sagesse, une bourse remplie d'or. Le voyageur put, ainsi, poursuivre sa route car il savait que, désormais, la paix avait trouvé son meilleur apôtre.