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Catherine

On ne fait plus l'amour : est-on encore un couple ?

Depuis vingt ans, les mœurs en matière de sexe ont plus qu’évolué, elles ont volé en éclats.

Dans la rue, sur nos écrans, le message est explicite : si tu ne jouis pas, c’est que ça ne va pas ! Finie cette idée morale qui, durant longtemps, a protégé le lien conjugal en nous poussant à composer avec l’autre, même en cas d’abstinence.


Aujourd’hui le couple passionnel longue durée est devenu un fantasme collectif. Même les ménages les plus traditionnels n’excluent plus la séparation si leur union ne répond pas à l’exigence de l’orgasme à tout prix. Or, cette pression ne va pas sans ravages. Écrasé par la norme, difficile de ne pas s’interroger : quand, à la maison, le désir ne circule plus avec la même fluidité qu’avant, cela implique-t-il de dresser un bilan ? Réponses de spécialistes.

Avec le temps, le désir s’est transformé en affection

Pas de raison d’en douter : l’amour n’a pas déserté votre ménage. Au contraire : au fil des ans, il s’est même renforcé. Dans la rue, il/elle vous tend toujours la main. Au lit, vous vous serrez encore contre l’autre. Il/elle est irremplaçable. Même si, côté sexe, ça n’est plus vraiment la fête. Comme si le désir s’était changé en profonde affection.

Pourquoi ça bloque ? Cette situation, très fréquente, rappelle à quel point le couple s’est longtemps construit sur d’autres bases que le sexe. Jusqu'au milieu des années 90, le lien amoureux invitait encore à faire des enfants, puis à investir sa famille sans s’inquiéter outre mesure de l’atténuation de l’intimité érotique. C’était admis : on savait encore dissocier sexualité, amour et reproduction. Logique que, vingt ans plus tard, beaucoup d’entre nous se sentent un peu perdus devant les nouvelles normes et s’interrogent, du coup, sur leur normalité.

Un conseil : cessez de douter, vous avez sans doute raison. La passion longue durée est un pari impossible à tenir, à moins d’en avoir conscience, et donc de mettre tout en œuvre pour que le désir survive. Continuez donc d’inventer à deux. Faites fi de ce très contemporain terrorisme sur notre sexualité. Passez encore plus de temps ensemble. D’autant que ni la tendresse, ni le respect n’ont jamais exclu les retours de flamme…

Ce que nous avons construit nous justifie amplement

C’est un fait, vous vous en souvenez : ensemble, vous faisiez l’amour, jadis. Mais depuis vous vous êtes investis ailleurs : enfants, maison, vacances, achats… Et puis, toutes ces épreuves traversées ensemble. Voilà ce que vous comptez en commun. Et c’est déjà beaucoup !

Pourquoi ça bloque ? Si, soumis au quotidien, le lien conjugal a tendance à se dés-érotiser, le fait de ne plus avoir de gestes tendres, et même de les éviter, est souvent le signe d’un couple endommagé. Comme si chaque conjoint était une simple pièce du décor. Difficile, dès lors, de réduire la distance qui tend à s’imposer.

Un conseil : bien sûr qu’au fil des ans, la sexualité d’un couple évolue, traverse des difficultés, mais ça n’empêche pas de construire. C’est vrai. Mais, vous êtes-vous demandé, récemment, si vous étiez suffisamment attentif à votre partenaire ? Depuis quand ne vous a-t-elle pas parlé ce qu’elle ressentait ? Lui avez-vous demandé si vous lui manquiez ? Alors, zou, osez. Vous pourriez être étonné...

Je n’ai plus envie d’avoir envie…

Qu’est-ce qu’on vous saoule avec ça ! Les bienfaits du sexe qu’on vante sur tous les toits… Pourtant, vous en êtes la preuve : on peut vivre parfaitement sans en avoir envie. Même quand on vit en couple. Il y a tant d’autres sources de réjouissances dans la vie : un bon repas, une séance de sport, la reconnaissance professionnelle…

Pourquoi ça bloque ? Un couple peut prendre de la distance sur le plan corporel, mais aussi affectif. Chez beaucoup de femmes, ce désinvestissement est souvent défensif : elles s’éloignent parce que les conditions de l’amour ne sont plus réunies. Si seulement leur partenaire les écoutait et leur parlait, sans doute feraient-elles un effort. Mais vu son état d’esprit, franchement, à quoi bon se motiver ?

Un conseil : difficile d’expliquer à un homme qui ne veut pas entendre, mais non, la sexualité féminine ne fonctionne pas comme la sexualité masculine. Elle n’est pas réflexe, mais, au contraire, sensible aux conditions, aux intentions de l’autre. Une femme a donc souvent besoin de sentir aimée pour que l’excitation puisse monter. Vous avez du mal à saisir ? Et si vous proposiez de consulter ?

Son absence de désir fait de nous des étrangers

C’est insupportable. Culpabilisant. Bien sûr que vous avez envie de rapprochements, de baisers profonds et de frissons, comme au cinéma. Mais elle, de son côté, ne tente plus rien.

Pourquoi ? Vous en êtes persuadé : en matière de sexe, les hommes ont des besoins ! Si elle ne vous sollicite plus, c’est donc que vous ne faites pas envie… Les femmes imaginent souvent que, côté masculin, désir et amour sont toujours imbriqués. C’est faux. Ainsi, la moitié des hommes de 50 ans et plus avouent rencontrer, parfois ou fréquemment, des difficultés sexuelles. Mais celles-ci n’ont rien de défaillances amoureuses : elles sont le plus souvent d’ordre physiologique ou psychique (dépression, stress, anxiété…).

Un conseil : n’attendez plus. Avant de perdre totalement confiance en vous, cherchez à comprendre et osez faire entendre votre inquiétude. Et n’oubliez pas : la sexualité est un apprentissage de toute une vie. S’il permet d’apprendre sur soi, il invite aussi à tenir compte des codes de l’autre. Puisque vous l’aimez, prenez donc le temps d’écouter.

Sous l’influence de la pornographie

Si certains couplent y ont recours pour pimenter leurs ébats, il arrive de plus en plus souvent que la pornographie pèse sur la sexualité conjugale. Logique : si les enquêtes prouvent que les sites X créent de plus en plus d’addictions chez les hommes, elles montrent aussi que les femmes, elles, ne s’y retrouvent toujours pas. D’où le décalage : les hommes déplorent de ne pas retrouver, dans la réalité, la même excitation que celle générée par les films pornos, quand les femmes, elles se mettent à angoisser : suis-je trop coincée ? Problème : des deux côtés, cela peut évidemment contribuer à atténuer le désir conjugal. L’air de rien, qu’on se le dise…

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