Par un bel après-midi de printemps, le Bouddha se promène. Le temps est délicieux, ni chaud, ni froid, un temps d'équilibre et de grâce auquel l'âme spontanément s'accorde.
Une légère brise souffle et, en arrivant face au portail d'un monastère, l’Éveillé constate que la bannière à son effigie fasèye doucement au vent.
Deux moines sont plantés devant :
- C'est la bannière qui bouge ! dit l'un.
- Non, c'est le vent ! rétorque l'autre.
- Selon la bonne doctrine, ce qui importe, c'est ce que nous voyons devant nous maintenant. Et c'est la bannière, et elle bouge !
- Pas du tout, ta vision est erronée, car l'agitation de la bannière n'est que la conséquence du vent, c'est lui la cause première, la réalité au-delà de l'apparence.
- Mais l'existence du vent est une hypothèse !
- La bannière ne bouge pas sans motif, sa réalité est constitutive du vent !
- Pure spéculation !
- Non, pas du tout !
- Mais si !
Les deux moines s'échauffent, ce qui n'est qu'une conversation aimable devient une dispute, une bataille. Peu s'en faut qu'ils n'en viennent aux mains.
C'est alors qu'ils aperçoivent le Bouddha qui les regarde, impassible.
Confus, ils se tournent vers lui :
- Maître, est-ce la bannière qui bouge ou est-ce le vent ?
- Moines, lança le Bouddha, ce n'est pas la bannière qui s'agite. Ce n'est pas le vent qui s'agite. C'est votre esprit qui s'agite.