Un moine bouddhiste et un jeune novice traversent un grand fleuve sur une petite barque. C’est l’hiver, le vent est fort, la surface de l’eau est agitée.
Le jeune novice est inquiet, sous les rafales du vent, leur embarcation lui semble bien précaire. Une pluie fine se met à tomber, c’est la fin du jour, la visibilité n’est pas bonne, et le jeune homme sent la peur le gagner.
Le jeune novice et son maître rament en silence. Dans le tumulte des flots, le bateau progresse tant bien que mal. Le novice s'inquiète :
- Maître, le vent se renforce, nos rames ne servent pas à grand-chose.
Le maitre reste calme et silencieux.
Soudain, le jeune novice avise un petit bateau au loin. Il lâche alors ses rames, se met debout et levant les bras au ciel, dit à son maître :
- Regardez maître, on dirait que cette barque arrive vers nous.
Le maître regarde l'horizon et demeure silencieux, continuant à ramer.
Dans les flots tourmentés, l'embarcation se rapproche encore.
– Maître, hurle le novice, je crois que ce rafiot va nous heurter. Il arrive droit sur nous !
- ...
– Maître, c’est tout de même insensé, la barque va nous éperonner. On dirait que celui qui tient le gouvernail veut nous faire couler. Il fait mine de ne pas regarder dans notre direction !
Puis, se dressant sur son bateau, le jeune novice fait de grands gestes.
- Le marin est tranquillement allongé dans sa barque ! Son inconscience va nous tuer. Assassin ! Criminel ! hurle-t-il.
- ...
Les deux embarcations se rapprochent mais, juste avant l'impact, le maître, d’une habile manœuvre, parvient à éviter la collision. Les deux embarcations indemnes poursuivent leur route.
- As-tu remarqué ce qu'il y avait dans la barque ? demanda le maître au novice.
- Oui, répondit celui-ci. Ce que je prenais pour un homme endormi n’était qu’un sac abandonné au fond du bateau.
- Alors mon fils, dis-moi, contre qui t’es-tu emporté ?