Le Soi n'est ni divisé ni indivisible, ni actif ni passif, ni mince ni gros, car il n'a aucun attribut.
Il n'est ni visible ni invisible, ni lumineux ni sombre, ni petit ni grand car il n'a aucune forme.
Il n'est ni creux ni plein, ni avec ni sans qualité, ni avec ni sans contour, car il est vacuité.
Il ne ressent pas la joie et n'en est pas libéré non plus, il n'est ni un ni plusieurs, ni libre ni attaché. C'est cela le Soi.
Comme le fruit est dans la fleur, la fleur dans le bourgeon, le bourgeon dans la branche, la branche dans l'arbre, l'arbre dans la graine, et la graine dans le fruit, de même "je suis" est partout et rien n'est en dehors du Soi universel.
La flamme et le feu sont un, les pétales du lotus sont unis à la fleur, et le fruit et la branche sont l'arbre lui-même, de même tout l'univers est le Soi.
L'humidité est dans l'eau, l'espace dans le ciel, la douceur dans le sucre : entre eux, il n'y a pas de séparation réelle.
Lorsque cette vision de l'unité est éveillée, l'homme trouve le vaisseau des richesses divines sur lequel il peut traverser l'océan de la vie. Où qu'il regarde alors, il ne voit que le divin et pénètre la félicité infinie.
Le Soi ne prend ni n'abandonne le corps. Et s'il est présent dans le corps, il n'est pas affecté par lui.
Il n'agit ni ne cause l'action. Il ne produit pas même le moindre événement fortuit. Il est éternellement pareil à lui-même. Ainsi il n'est dépendant ni du plus ni du moins.
Comme les étincelles du feu, toutes les formes créées sont enracinées dans l'Un.
Lorsque le pot de terre se brise et que ses morceaux sont jetés, l'air qu'il contenait se mélange à l'air ambiant qui est partout.
De la même manière, lorsque la conscience "je suis ce corps" meure avec le corps, si l'homme se souvient de sa nature véritable il atteint l'expérience de l'union et rien d'autre. Il devient immédiatement un avec le Soi.
Ensuite, bien qu'il demeure encore dans le corps, il n'est plus dépendant de ses attributs et des qualités de la naissance.
Alors, le vent du souci du corps cesse de souffler et l'âme individuelle s'unit au divin comme la vague se fond dans l'océan.
Comme les vagues de l'océan, les rayons du soleil, les atomes de la terre et les membres du corps, les sensations du corps naissent dans l'esprit.
Comme un poisson dans les eaux de l'existence terrestre, il te faut connaître les plaisirs et les peines, mais ne t'en préoccupe pas, établis-toi dans la véritable nature des choses.
Comme la graine se sépare de la cosse, comme les eaux du Gange, après avoir parcouru les méandres du lit du fleuve, laissent la turbulence du courant et se fondent dans l'océan, de même, ô conquérant de l'ultime richesse, plaisirs et peines doivent être acceptées comme des conditions de l'existence dans un corps pour celui qui a commencé à fréquenter le Soi.
Comme la plus grande vague n'est pas différente de l'océan, de même il n'y a pas de séparation entre toi et le Soi de l'univers.
Le lingot d'or et la parure sont tous deux de l'or, et un rayon de lumière est la lumière elle-même ; tu dois me concevoir de la même manière. Ne te considère pas différent du Soi. Tu es dans le Soi comme un atome de poussière sur la terre.
Cette vision illuminée par l'unicité est la véritable dévotion. Il n'y a qu'un seul fil tissé d'un bout à l'autre d'une étoffe, de même le dévot ne reconnaît que le Soi dans tout l'univers.
Comme l'eau tombe de la cascade sans effort, il est dans sa nature d'accorder le même respect à chacune des créatures qu'il voit.
Comme la branche couverte de fruits se penche naturellement vers le sol, il s'incline devant toutes les créatures.
Sans se préoccuper de sa propre grandeur, il ne distingue pas entre ce qui a de la valeur et ce qui n'en a pas.
Rangeant tout ensemble, il aime s'incliner devant toute chose.