En ce temps-là vivait dans un temple perdu dans la forêt, un moine connu pour sa grande sagesse. Ce soir-là, le saint homme était seul. Il récitait des sutras au pied d'une statue du Bouddha.
Soudain, la porte du temple s'ouvrit à la volée et un homme d'aspect effrayant, grossièrement vêtu, fit irruption dans la salle de prières. Il mit sur la gorge du moine une longue épée effilée :
- Moine ! hurla-t-il, donne-moi l'argent des offrandes ou je te coupe la tête !
Le moine, installé en prière, le dos droit, les genoux repliés, garda la position et pas un muscle de son visage ne tressaillit :
- Prend l'argent qui est dans le vase des offrandes, dit-il, ne me dérange pas dans mes prières.
Et il reprit la récitation des sutras.
Le voleur se dirigea vers l'endroit indiqué et commença à remplir ses poches. Dans sa hâte, il faisait tinter les pièces et parfois un juron lui échappait quand l'une d'elles roulait sur le sol.
Au bout d'un moment, sans tourner la tête, le moine dit :
- Ne prends pas tout l'argent, je dois payer demain matin l'impôt du temple.
Le voleur, impressionné par la fermeté de la voix et le sang-froid imperturbable du moine, laissa en maugréant un peu d'argent au fond du vase des offrandes.
Il s'en allait avec son butin lorsque le moine dit encore :
- Quand on reçoit un présent, on doit remercier, fais-le !
Le voleur, subjugué, marmonna un vague merci et disparut.
Un an plus tard, le voleur fut arrêté. Il avoua, entre autres méfaits, le vol commit au temple, crime puni de mort.
Confronté au moine, il l'entendit avec stupeur déclarer :
- Je déclare que cet homme n'a pas profané le temple, je lui ai donné une grande partie de l'argent des offrandes et il m'a remercié, tout est en ordre.
Le voleur fut condamné à cinq ans de prison seulement.
Quand il fut libre, il vint trouver le moine dans le temple perdu dans la forêt, et devint son disciple.
Au long des années, les visiteurs et les pèlerins admiraient sa profonde piété.